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ÉMILIE DE TOURVILLE
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vingt ans, le vieux président, dis-je, en arrosant de larmes le sein de cette chère enfant, répondit au comte qu’il se trouvait trop heureux d’un tel choix, que tout ce qui l’affligeait était que sa chère Émilie n’en était pas digne ; et le marquis de Luxeuil s’étant alors jeté de son côté aux genoux du président, le conjura de lui pardonner ses torts et de lui permettre de les réparer. Tout se promit, tout s’arrangea, tout se calma de part et d’autre, les frères seuls de notre intéressante héroïne refusèrent de partager la joie générale et la repoussèrent quand elle s’avança vers eux pour les embrasser ; le comte, furieux d’un tel procédé, voulut en arrêter un qui cherchait à sortir de l’appartement. M. de Tourville s’écria au comte : Laissez-les, monsieur, laissez-les, ils m’ont horriblement trompé ; si cette chère enfant eût été aussi coupable qu’ils me l’ont dit, consentiriez-vous à la donner à votre fils ? Ils ont troublé le bonheur de mes jours en me privant de mon Émilie… laissez-les… et ces malheureux sortirent en fulminant de rage. Alors le comte instruisit M. de Tourville de toutes les horreurs de ses fils et des véritables torts de sa fille ; le président voyant le peu de proportion qu’il y avait entre

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