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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX


Trois ou quatre mois, juste ciel… et se tournant vers son épouse : Trois ou quatre mois, mignonne, y tiendriez-vous, mon ange, y tiendriez-vous ? — Oh, monsieur Delgatz s’adoucira, j’espère, répondit avec une naïveté feinte la jeune Téroze, il aura au moins pitié de moi, s’il ne veut en avoir de vous… et l’on partit pour la promenade. Il y avait un bac à passer pour se rendre chez un gentilhomme voisin, prévenu de tout et qui attendait la compagnie à goûter ; une fois dans le bateau, nos jeunes gens se mettent à polissonner, et Fontanis pour plaire à sa femme ne manque pas de les imiter. — Président, dit le marquis, je gage que vous ne vous suspendez pas comme moi à la corde du bac et que vous n’y restez pas plusieurs minutes de suite. — Rien de plus aisé, dit le président en achevant sa prise de tabac et s’élevant sur la pointe des pieds pour mieux attraper la corde. — Bien, bien, infiniment mieux que vous, mon frère, dit la petite Téroze dès qu’elle voit son mari accroché. Mais pendant que le président ainsi suspendu fait admirer ses grâces et son adresse, les bateliers qui ont le mot doublent de rames, et la barque s’échappant avec vivacité laisse le malheureux entre le ciel et l’eau… Il crie, il appelle à lui, on n’était qu’au milieu de la traversée, il