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HISTORIETTES, CONTES ET FABLIAUX

Que le diable m’emporte si je bouge, dit le président éreinté, que ces coquins-là l’étrillent comme moi s’ils veulent, je ne m’en mêle pas, chacun a assez de ses propres querelles sans se mêler de celles des autres. Cependant le bruit redouble, et d’Olincourt entre enfin dans la chambre de Fontanis, suivi de ses deux valets jetant tous trois les hauts cris comme si l’on les eût égorgés : tous les trois paraissaient ensanglantés, l’un avait le bras en écharpe, l’autre un bandeau sur le front et l’on eût juré à les voir pâles, échevelés, sanglants comme ils l’étaient, qu’ils venaient de se battre contre une légion de diables échappée de l’enfer. Oh, mon ami, quel assaut, s’écrie d’Olincourt, j’ai cru que nous y serions étranglés tous les trois. — Je vous défie d’être plus malmenés que moi, dit le président en montrant ses reins tout meurtris, regardez comme ils m’ont traité. — Oh, par ma foi, mon ami, dit le colonel, vous voilà pour le coup au cas d’une belle et bonne plainte, vous n’ignorez pas l’intérêt puissant que vos confrères ont pris de tous les siècles à des culs fouettés ; faites assembler les chambres, mon ami, trouvez quelque avocat célèbre qui veuille bien exercer son éloquence en faveur de vos fesses molestées : usant de l’artifice ingénieux par lequel un orateur