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LA MARQUISE DE GANGE

lui avait dit n’était que pour posséder la marquise seule ; que les brigands de chez lesquels il sortait n’avaient besoin ni de grâce ni de défenseurs : et que s’il s’avisait de faire la moindre démarche pour ou contre ces gens-là, il serait assassiné sous huitaine, dans quelque lieu qu’il pût se réfugier. On le laissa en prononçant ces mots. Nous reviendrons à lui quand il en sera temps. Retournons dans le souterrain.

Rien ne se démentit dans la conduite qu’on avait promis d’observer avec la marquise ; attentions, prévenances, propos honnêtes, tout avait été mis en usage. Mais, au bout de trois ou quatre jours, le chef eut l’air de ne pouvoir tenir à l’amour que lui inspirait une aussi belle femme : il lui déclara ses sentiments, et ses égards diminuèrent beaucoup quand il s’aperçut de la répugnance invincible que la marquise témoignait pour lui. Cependant, elle ne crut pas au travers de tout cela devoir dissimuler l’inquiétude qu’elle éprouvait du long retard de Villefranche. Cette ouverture venait d’être faite par Euphrasie, un jour où, les camarades en course, cette infortunée se trouvait absolument seule avec le chef. — Cessez de vous inquiéter, madame, lui dit arrogamment ce vilain homme : vous ne reverrez plus Villefranche ; mes paroles sont aussi trompeuses que mes actions, et vous ne sortirez d’ici que morte ou mon épouse. Mais, comme le brutal s’aperçut