Page:Sade - La marquise de Gange, Pauvert, 1964.djvu/118

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
108
LA MARQUISE DE GANGE

à la lecture de ce billet. — Oui, mon cher ange, s’écria-t-il, tu m’aimes, et je t’adorerai toute ma vie ; tu n’es pas plus coupable que moi, j’en suis sûr ; hâtons-nous de nous en convaincre l’un et l’autre… Et, sans aucun préparatif, le marquis s’élance dans une voiture et se fait conduire à Montpellier.

En vertu de la lettre de sa femme et de celle de l’évêque, qu’il avait reçue en même temps, ce fut chez le prélat qu’il descendit ; et après s’être fait annoncer, l’évêque, sans vouloir entrer dans aucune explication, se contenta de lui délivrer l’ordre de voir sa femme tant qu’il le voudrait ; et en lui donnant ce papier, il y joignit celui qu’Euphrasie avait signé dans le souterrain. — À l’égard de cette pièce, dit-il au marquis, mon devoir et ma conscience m’obligent à vous la remettre, mais en vous prévenant que je ne la regarde que comme un monument de la scélératesse de ce Deschamps, et comme une preuve de l’extrême terreur qu’il sut répandre dans l’âme d’une épouse contre laquelle ceci ne doit vous rien faire présumer.

Avant de rien examiner, Alphonse vole au couvent, obtient de l’abbesse la permission de voir sa femme dans une salle extérieure ; et ce fut là que madame de Gange dit à son époux : — Oh ! mon ami, quand j’eus vu le cruel spectacle qui prouvait si bien votre infidélité, je n’écoutai plus