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LA MARQUISE DE GANGE

pour légitimer la détention de la fille ? — Je dévoilerai sa conduite. — Tu ne le peux qu’en te déshonorant toi-même. — Ne vas-tu pas conclure de là qu’il faille, pour perpétuer ma honte, que je laisse cette femme libre ? — Ce n’est pas du tout cela que je veux dire ; mais voici, je crois, ce qu’il serait prudent de faire : il faut m’envoyer ici madame de Châteaublanc avec son petit-fils… Dès qu’elle aura quitté Avignon, faire courir le bruit que des affaires importantes l’ont appelée, elle et son enfant, à Paris. Je te réponds de ces trois personnes, dès qu’elles seront en ma puissance ; mais la précaution que je te conseille est d’autant plus essentielle, que madame de Nochères, cette parente fort riche que tu lui connais, va faire son testament en faveur d’Euphrasie, qui, mécontente de nous, testera elle-même en faveur de sa mère et de son fils. Il est donc, comme tu le sens, très important de prendre des précautions. Ce n’est pas tout, mon frère, que de s’occuper de sa vengeance, il faut penser à l’intérêt. Madame de Châteaublanc, une fois en nos mains, et crue à Paris, sera oubliée ; elle est peu connue dans le monde, nous la ferons passer pour morte. De ce moment, les biens laissés par madame de Nochères reviennent indubitablement à ta femme dont il deviendra très facile de prouver l’aliénation, d’après sa conduite ; et nous voilà maîtres des biens jusqu’à la majo-