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LA MARQUISE DE GANGE

dédommageront un jour des privations que vous supportez un instant ! — J’y compte, mon frère, répondit la marquise, et je vous avoue que voilà les seules idées qui me tranquillisent depuis que je suis dans ma retraite. — Combien je voudrais l’adoucir d’une manière plus positive encore ! dit le perfide abbé, en lançant sur Euphrasie des yeux remplis de flamme. — Ah ! quel meilleur adoucissement puis-je recevoir dans mes tribulations, répondit l’épouse d’Alphonse, que celui que l’Éternel m’accorde ? — Je suis bien loin de vous enlever ce qui fait votre bonheur, dit l’abbé, mais je n’en pense pas moins qu’il serait possible de vous dissiper davantage. — Et comment ? — Vous voyez qu’on me laisse absolument l’arbitre de votre destinée… Croyez-vous que si vous aviez pitié de la mienne, je ne trouverais pas le moyen d’adoucir la vôtre ?… Ici, la spirituelle marquise, qui crut comprendre Théodore, détourna de lui ses regards avec une sorte d’inquiétude qu’il lui fut impossible de déguiser. — Je ne vous entends pas, mon frère, lui dit-elle avec douceur : mon sort, dites-vous, prescrit par Alphonse, ne peut être adouci que par lui… Qu’oseriez-vous donc faire sans son aveu ? — Vous adorer, madame, » dit Théodore, en se jetant aux pieds de la marquise, vous jurer un amour qui ne finira qu’avec ma vie, et qui prit sa naissance aux premiers instants que je vous vis. Ici la marquise,