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LA MARQUISE DE GANGE

vous en donner une où vos évasions nocturnes ne seront plus si faciles. Alors le farouche abbé, entraînant sa sœur avec cette colère féroce qui n’est dictée que par le crime, la plongea dans le cachot de cette même tour où l’air pénétrait à peine, et où elle ne trouva qu’un peu de paille pour se reposer. — Rose, prenez les clés de madame, dit l’abbé, et si vous en faites encore un aussi mauvais usage, ce même cachot vous servira de sépulcre. Ici l’infortunée marquise, résignée à tout, n’opposa qu’un noble courage à la bassesse de son bourreau : des larmes l’eussent fait triompher ; elle n’en répandit pas une ; et, semblable aux premiers chrétiens persécutés pour la foi, les portes de son cachot se refermèrent sur elle au bruit du chant des Psaumes où le saint roi demande à Dieu le pardon de ses ennemis.

Ô religion ! voilà tes douceurs ; plus de maux sur la terre pour celui que ta main console. Eh ! pourquoi s’affliger des tourments qu’on y souffre, quand la certitude de renaître au sein d’un Dieu de paix nous offre un si doux avenir !

— L’imprudence que vous avez commise cette nuit, madame, dit Théodore en entrant chez la mère de sa victime, ne s’allie ni avec votre âge, ni avec votre sagesse. Persuadée que de fortes raisons nous obligent à vous tenir dans cette