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LA MARQUISE DE GANGE

différente de celle par où elle est entrée… — Artificieuse créature, dit le marquis de Gange, s’éclairant de deux flambeaux, dont les reflets, frappant les yeux éblouis de la marquise, l’empêchent de voir un jeune homme s’échappant avec rapidité ; femme coupable et digne de tout mon courroux, poursuit le marquis en fureur, voilà donc comme tu multiplies tes désordres, et comme tu ne cherches pas même à les déguiser ! Mais Euphrasie, conservant son sang-froid, se jette dans l’appartement de madame de Donis, où son mari se précipite également. — Que signifient, dit-elle, avec ce noble courage que donne la vertu, que veulent dire, madame, les scènes horribles que vous m’occasionnez ? N’est-ce donc pas vous-même qui venez de me précipiter dans le piège, et n’est-ce donc pas avec mon mari que vous me ménagiez cette entrevue ? — Quelle fausseté, dit Alphonse, toujours en fureur. Si je n’étais pas avec vous, j’en étais fort près. Avez-vous dit un seul mot, dans ce tête-à-tête, qui prouvât que ce fût à moi que vous vous adressiez ?

— Et comment l’eût-elle fait, dit précipitamment la comtesse, puisqu’elle était bien sûre d’être avec l’amant qu’elle m’avait suppliée de lui laisser voir chez moi, ce à quoi je ne me suis prêtée qu’en avertissant son époux. — Impudente ! — Silence, madame, silence, poursuivit madame de Donis, il ne me convenait pas de rien faire pour vous