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LA MARQUISE DE GANGE

dans les romans, mais ceci n’en est pas un ; j’ai cent manières de triompher, et je les emploierai toutes, si j’en ai besoin. — Il en est, monsieur, que vous n’oserez pas mettre en usage. — Assurément, j’oserai toutes celles qui pourront m’assurer sa personne et son cœur ; mais si je ne devais posséder l’une qu’aux dépens de l’autre, mon orgueil humilié ne les adopterait peut-être pas. Nous agirons enfin d’après les circonstances ; et j’ai toujours remarqué que le ciel favorisait les audacieux. — Oui, monsieur, cet adage est connu, mais il n’est pas toujours bien certain. Que de victimes dans cette terrible entreprise ! — Elles seront toutes offertes à ma déesse, et jamais les dieux ne se plaignent de la prodigalité de l’encens.

Le reste de la conversation n’eut plus pour objet que l’établissement de certaines mesures nécessaires à la réussite. Théodore instruisit Perret de ce qu’il avait à faire, et l’on se sépara.

Les promesses que la marquise avait faites à l’abbé de Gange ne la laissaient pas sans inquiétude. Elle était loin de concevoir aucun soupçon sur les procédés de son beau-frère ; mais cette feinte que l’abbé croyait nécessaire, cette nécessité de sonder son mari par une imposture si éloignée de son caractère, répandaient une sorte de trouble dans son âme, dont tout son physique se ressentait. Elle avait promis d’agir et de se taire ; mais la