Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/181

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« Parmi les jeunes gens que je débauche, Justine, il en est quelques-uns qui ne se livrent à moi que par complaisance ; ceux-là auraient besoin de voir à nud les attraits d’une jeune fille. Cette nécessité offense mon orgueil : j’aimerais bien mieux que cet état où je les desire ne fût dû qu’à moi. Cependant, comme il m’est indispensable, je préférerais, mon ange, le devoir à toi qu’à tout autre ; je ne me douterais de rien, tu les disposerais dans mon cabinet, et ne les ferais passer dans ma chambre que quand ils seraient en état. Oh ! monsieur, répondait Justine en larmes, pouvez-vous me proposer de pareilles choses ? et les horreurs où vous vous livrez… Ah ! Justine, interrompit Bressac, peut-on jamais se corriger de ce penchant !… Si tu pouvais en connaître les charmes ; si tu pouvais comprendre ce qu’on éprouve à la douce illusion de n’être plus qu’une femme ! Incroyable égarement de l’esprit ; on abhorre ce sexe, et l’on veut l’imiter ! Ah ! qu’il est doux d’y réussir, qu’il est délicieux d’être la putain de tous ceux qui veulent de vous, et portant sur ce point au dernier période, le délire et la prostitution, d’être successivement, dans le même jour, maîtresse d’un crocheteur, d’un valet, d’un