Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/213

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tion dans la nature, et vous prétendez que la nature est sans énergie ! vous croyez imbécillement que ce tout, agissant essentiellement, peut avoir besoin d’un moteur ! Et quel est-il donc ce moteur ? Un esprit, c’est-à-dire, un être nul. Persuadez-vous donc, au contraire, que la matière agit par elle-même, et cessez de raisonner sur votre moteur spirituel, qui n’a rien de ce qu’il faut pour la mettre en action ; revenez de vos incursions inutiles ; rentrez d’un monde imaginaire dans un monde réel ; tenez-vous-en aux causes secondes ; laissez aux théologiens leur cause première, dont la nature n’a nullement besoin pour produire tout ce que vous voyez. Oh ! Justine, comme j’abhorre, comme je déteste cette idée d’un Dieu ! comme elle choque ma raison et déplaît à mon cœur ! Quand l’athéisme voudra des martyrs, qu’il le dise, et mon sang est tout prêt.

Détestons ces horreurs, chère fille ; que les outrages les mieux constatés cimentent le mépris qui leur est si bien dû. À peine avais-je les yeux ouverts, que j’abhorrais ces rêveries grossières ; je me fis dès-lors une loi de les fouler aux pieds… un serment de n’y plus revenir. Imites-moi, si tu veux être heureuse ;