Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/268

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une peau aussi belle, des yeux aussi brillans, des cheveux si superbes, une manière de s’exprimer aussi pure ; ce n’est pas, sans doute, avec toutes ces graces que l’on se trouve réduite à servir : si bien traitée par la nature, vous ne sauriez être la victime du sort, et je dois bien plutôt attendre des ordres de vous, qu’il ne m’appartient de vous en donner. — Oh ! monsieur, à quel degré pourtant je dois me plaindre de la fortune ! Eh bien c’est une injustice ; nous la réparerons, mademoiselle ; et, là-dessus, Justine, encouragée, raconta ses malheurs à Rodin. Voilà qui est affreux, dit l’adroit imposteur ; ce monsieur de Bressac est un monstre, connu depuis long-tems par ses excessives débauches, et je vous regarde comme très-heureuse d’être sortie de ses mains. Mais, belle Justine, je persiste à vous dire que vous n’êtes pas créée pour servir : celle aux genoux de qui devrait être l’Univers, celle qui pourrait l’enchaîner par ses yeux, ne doit exister que pour être libre. Si ma maison vous convient, je vous l’offre ; j’ai une fille qui vient d’atteindre sa quatorzième année, elle sera trop heureuse d’avoir une société comme la vôtre, vous mangerez avec nous, vous partagerez nos