Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 1, 1797.djvu/277

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vois que tu es incapable de trahir les secrets que j’ai à te révéler, et je ne veux plus en avoir pour toi :

Assurément ma chère amie, mon père, ainsi que tu l’observes fort bien, pourrait se passer du métier qu’il exerce, et s’il tient à l’une et à l’autre de ces professions, deux motifs que je vais te développer en sont causes. Il exerce la chirurgie par goût, pour le seul plaisir de faire de nouvelles découvertes ; il les a tellement multipliées, il a donné sur cette partie des ouvrages si goûtés, qu’il passe pour le plus habile homme qu’il y ait maintenant en France ; il a travaillé quelques années à Paris, et c’est pour son agrément qu’il s’est retiré dans cette campagne ; le véritable chirurgien de Saint-Marcel est un nommé Rombeau qu’il a pris sous sa protection, et qu’il associe à ses expériences. Tu veux savoir à présent, ce qui l’engage à tenir pension, le libertinage, ma chère, le seul libertinage, passion portée à l’extrême en lui ; mon père et ma tante, aussi débauchés l’un que l’autre, trouvent tous deux dans leurs écoliers mâles ou femelles des objets que la faiblesse et la dépendance soumettent à leur luxure, et ils en profitent ; leurs goûts se ressemblent,