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des penchans qu’il ne tient que de lui seul : ô Juliette ! s’écria mon institutrice ; puis-je concevoir cet infernal et détestable Dieu, autrement que comme un tiran, un barbare, un monstre, auquel je dois toute la haine, tout le courroux, tout le mépris que mes facultés physiques et morales peuvent exhaler à-la-fois.

Ainsi, vînt-on même à bout de me démontrer… de me prouver l’existence de Dieu, dût-on réussir à me convaincre qu’il a dicté des loix ; qu’il a choisi des hommes pour les attester aux mortels ; me fit-on voir que le plus harmonieux accord règne dans toutes les relations qui viennent de lui, rien ne pourrait me prouver que je lui plais, en suivant ses loix, car s’il n’est pas bon, il peut me tromper, et ma raison qui ne vient que de lui, ne me rassurera pas, puisqu’il peut alors ne me l’avoir donnée, que pour mieux me précipiter dans l’erreur.

Poursuivons : Je vous demande maintenant, ô déistes, comment ce Dieu que je veux bien admettre un moment, se conduira vis-à-vis de ceux qui n’ont aucune connaissance de ses loix : si Dieu punit l’ignorance invincible de ceux auxquels ses loix n’ont