Page:Sade - La nouvelle Justine, ou les malheurs de la vertu, suivie de L'histoire de Juliette, sa soeur, tome 6, 1797.djvu/80

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connais pas ; et je ne le puis, si je le connais ; de manière qu’on n’a qu’à me persuader qu’un individu que je viendrai de tuer est mon père, quoiqu’il ne le soit pas, voilà des remords appliqués à une fausse notion. Or, s’ils existent, quoique la chose ne soit pas, ils ne sauraient légitimement exister, quand elle est. Si vous pouvez me tromper sur cela, mon crime est une chimère ; si la nature, ne m’indique pas d’elle-même, l’auteur de mes jours, c’est qu’elle ne veut pas que j’éprouve d’autre tendresse pour lui, que celle que m’inspire un être indifférent ; si le remords peut être appliqué après votre opinion, et que votre opinion puisse me tromper, le remords est nul ; je suis un fou de le concevoir. Les animaux connaissent-ils leur père ? le soupçonnent-ils seulement ? motiverez-vous ma reconnaissance filiale sur les soins que ce père a pris de mon enfance ? autre erreur. Il a cédé, en les prenant, aux usages de son pays… à son orgueil, à un sentiment, que lui, comme père, peut avoir eu pour son ouvrage, mais que je n’ai nul besoin, moi, de concevoir pour l’ouvrier ; car cet ouvrier iniquement occupé de son plaisir, n’a nul-