Page:Sade - Les 120 Journées de Sodome, éd. Dühren, 1904.djvu/22

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qu’ils goûtent, ils frémissent en se les permettant, de façon qu’ils deviennent tout à la fois, et vertueux dans le crime et criminels dans la vertu. Mon caractère plus ferme, ajoutait notre héros, ne se démentira jamais ainsi. Je ne balance jamais dans mes choix et comme je suis toujours certain de trouver le plaisir dans celui que je fais, jamais le repentir ne vient émousser l’attrait ferme dans mes principes parce que je m’en suis formé dès mes plus jeunes ans. J’agis, toujours conséquemment à eux, ils m’ont fait connaître le vide et le néant de la vertu, je la hais, et l’on ne me verra jamais revenir à elle. Ils m’ont convaincu que le vice était seul fait pour faire éprouver à l’homme cette vibration morale et physique, sources des plus délicieuses voluptés, je m’y livre, je me suis mis de bonne heure au-dessus des chimères de la religion, parfaitement convaincu que l’existence du créateur est une absurdité révoltante que les enfants ne croient mêmes plus. Je n’ai nullement besoin de contraindre mes penchants dans la vue de lui plaire, c’est de la nature que je les ai reçus les penchants et je ne l’irriterais en y résistant si elle me les a donné mauvais, c’est qu’ils devenaient ainsi, nécessaires à ses vues, je ne suis dans sa main qu’une machine qu’elle meut à son gré et il n’est pas un de mes crimes qui ne la servent, plus elle m’en conseille, plus elle en a besoin, je servis un sot de lui résister. Je n’ai donc contre moi que les lois, mais je les brave, mon or et mon crédit me mettent au-dessus de ces fléaux vulgaires, qui ne doivent frapper que le peuple. Si l’on objectait au duc, qu’il existait cependant chez tous les hommes des idées de juste et d’injuste, qui ne