Page:Sade - Les 120 Journées de Sodome, éd. Dühren, 1904.djvu/252

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

meur en moi, de me plaindre. Le fond de mon ordinaire consistait en une immensité de blanc de volaille, et de gibier désossé, accommodés de toute sorte de façons, peu de viande de boucherie, mille sortes de graisse, fort peu de pain et de fruits. Il fallait manger de la sorte de viande même le matin, à déjeuner, et le soir à goûter, et ces heures-là, on me les servait sans pain, et d’Aucourt peu-à-peu me pria de m’en abstenir tout à fait, au point que dans le dernier temps je n’en mangeais plus du tout, non plus de potage, il résultait de ce régime, comme il l’avait prévu, deux scelles par jour, très adoucies, très molles et d’un goût le plus exquis à ce qu’il prétendait, ce qui n’en pouvait pas être avec une nourriture ordinaire, et il fallait le croire, car il était connaisseur. Nos opérations se faisaient à son réveil et à son coucher ; les détails étaient à-peu-près les mêmes que je vous aie dits, il commençait toujours par sucer très longtemps ma bouche, qu’il fallait toujours lui présenter dans l’état naturel et sans jamais être lavée, il ne m’était permis de la rincer qu’après, d’ailleurs il ne déchargeait pas à chaque fois. Notre arrangement n’exigeant aucune fidélité de sa part, d’Aucourt m’avait chez lui comme le plat de résistance, comme la pièce de bœuf, mais il n’en allait pas moins, tous les matins se divertir ailleurs ; d’un jour après mon arrivée, ses camarades de débauche vinrent souper chez lui, et comme chacun des trois offrait dans le goût que nous analysons un genre différent de passion, quoique qu’il dans le fond — vous prouvera-t-on — mêmes que devant faits rouler dans notre recueil, j’appuye un peu sur les fantaisies auxquelles ils se liv-