Page:Sade - Les 120 Journées de Sodome, éd. Dühren, 1904.djvu/296

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se réveilla assez bien rétabli, et pour lui rendre encore mieux ses forces, Colombe le suça un instant, son engin remonta le nez, et l’on passa au salon d’histoire — il avait ce jour-là Julie sur le canapé, comme il l’aimait assez, cette vue lui rendit un peu de bonne humeur, le duc avait Aline, Durcet Constance, et le président sa fille, tout étant prêt, la belle Duclos s’installa sur son trône et commença ainsi : „Il est bien faux de dire que l’argent acquis par un crime ne porte pas bonheur, nul système aussi faux, j’en réponds — tout prospérait dans ma maison, jamais la Fournier n’y avait vu tant de pratique ; ce fut alors, qu’il me passa par la tête une idée un peu cruelle, je l’avoue, mais qui pourtant, j’ose m’en flatter, messieurs, ne vous déplaira pas à un certain point, — il me semble que quand on n’avait pas fait à quelqu’un le bien que l’on devait lui faire, il y avait une certaine volupté méchante à lui faire du mal et ma perfide imagination m’inspira cette taquinerie libertine contre ce même petit Pétignon, fils de ma bienfaitrice, et auquel j’avais été chargé de compter une fortune bien attrayante certainement pour ce malheureux, et que je commençai déjà à dissiper en folies, voici ce qui en fit naître l’occasion. Ce malheureux garçon cordonnier marié avec une pauvre fille de son état, avait pour unique fruit de cet hymen infortuné, une jeune fille de 12 ans et que l’on m’avait dépeinte comme réunissant aux attraits de l’enfance tous les attributs de la plus tendre beauté ; cet enfant qu’on élevait pauvrement mais cependant avec tout le soin que pouvait permettre l’indigence des parents, dont elle faisait les délices, me parut une excellente capture à faire, Pétignon ne ve-