Page:Sade - Les crimes de l'amour, Nouvelles héroïques et tragiques, tome 1, 1799.djvu/90

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

non-seulement vous empêchez que je ne puisse me faire entendre, mais vous profitez même de cet instant pour plonger mon malheureux père dans une affreuse prison. Ah ! monsieur le duc, ceux qui, comme lui, ont versé près de vous leur sang pour la patrie, me paraissaient mériter plus d’égards ; ainsi donc pour éluder ma première demande, vous me contraignez d’en faire une seconde, et vous me précipitez dans de nouveaux malheurs, pour éteindre en moi le souvenir des premiers ?… Ah ! monsieur, la rigueur, toujours voisine de l’injustice et de la cruauté, énerve les ames, leur enlève l’énergie qu’elles ont reçue de la nature, par conséquent le goût des vertus ; et l’état alors, au lieu de la gloire de commander à des hommes libres, entraînés vers lui par le cœur, n’a plus sous sa verge de fer que des esclaves qui l’abhorrent. — Votre père est coupable, Juliette, il est maintenant impossible de se faire illusion sur sa conduite ; le château dans lequel il était s’est trouvé rempli d’armes et de muni-