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S’il n’en est pas un, pourquoi faire des loix qui le punissent ? Et s’il en est un, par quelle barbare et stupide inconséquence le punirez-vous par un crime semblable ?

Il nous reste à parler des devoirs de l’homme envers lui-même. Comme le philosophe n’adopte ces devoirs qu’autant qu’ils tendent à son plaisir ou à sa conservation, il est fort inutile de lui en recommander la pratique, plus inutile encore de lui imposer des peines s’il y manque ; le seul délit que l’homme puisse commettre en ce genre est le suicide ; je ne m’amuserai point ici a prouver l’imbécillité des gens qui érigent cette action en crime, je renvoie à la fameuse lettre de Rousseau ceux qui pourroient avoir encore quelques doutes sur cela ; presque tous les anciens gouvernemens autorisoient le suicide, par la politique et par la religion ; les Athéniens exposoient à l’aréopage les raisons qu’ils avoient de se tuer, ils se poignardoient ensuite ; toutes les républiques de la Grèce tolérèrent le suicide, il entroit dans le plan des anciens législateurs, on se tuoit en public, et l’on faisoit de sa mort un spectacle d’appareil ; la république de Rome encouragea le suicide, les dévouemens si célèbres pour la patrie n’étoient que des sui-