Page:Saint-Amant - Œuvres complètes, Livet, 1855, volume 1.djvu/46

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Amant mourut peu après, et sans doute après sa mort Sercy, qui s’étoit chargé de l’impression, ne publia même pas un poème qui n’avoit d’autre mérite peut-être que son opportunité. Brossette prétend que l’auteur y félicitoit Louis XIV de savoir nager, et semble trouver cette louange fort ridicule. Nous croyons que la poésie n’a pas moins de privilège que la prose, et qu’il n’est aucune idée, aucun sentiment, que les vers ne puissent rendre ; les termes seuls de l’éloge et la place qu’il occupe dans le poème peuvent le disculper ou le condamner. Mais cet ouvrage est perdu, et nous n’en pouvons parler que par ouï-dire.

On prétend que l’accueil fait par le roi à la Lune parlante abrégea les jours de Saint-Amant. Nous ne croyons pas plus à ce conte qu’à la mort de Racine avancée par un coup d’œil de Louis XIV. Lorsqu’il mourut, Saint-Amant avoit soixante-sept ans ; mais les folies de sa jeunesse, les fatigues de ses voyages, l’avoient usé, et il sembloit plutôt âgé de 74 ou 75 ans. C’est ce que nous apprend une note curieuse extraite d’un journal de Colletet le fils, et que nous avons été le premier à publier en 1852, d’après une communication du savant M. Rathery, de la bibliothèque du Louvre :

« Le jeudy, 29e décembre 1661, jour de saint Thomas de Cantorbéry, mourut chez monsieur Monglas, son ancien hôte, qui étoit décédé huit jours avant, le sieur Saint-Amant, âgé de 74 ou 75 ans, après une maladie de deux jours. Il reçut les sacrements et mourut un peu devant midy : Monsieur l’abbé de Villeloin l’assista en ce dernier moment, et luy rendit ce dernier devoir. Il est inhumé à… » (Incomplet.)

Ces quelques mots, en même temps qu’ils nous apprennent la date exacte de la mort de Saint-Amant, prouvent encore combien est erronée l’assertion de Tallemant des Réaux, qui prétend que l’auteur du Moïse étoit huguenot, comme Conrart et Gombauld. Saint-Amant étoit catholique, et si sa jeunesse fort orageuse ne prouve pas une bien vive piété, ses dernières années nous le montrent revenu à résipiscence, et sa mort fut celle d’un chrétien.