Page:Saint-Bernard - Oeuvres complètes, trad Charpentier, Tome 2, 1866.djvu/600

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Que signifiait encore cet antique buisson de Moïse Marie est le buisson incombustible, et la verge d’Aaron. qui lançait des flammes, mais sans se consumer (Exode, iii, 2), sinon Marie enfantant sans douleur ? Qu’est-ce encore que cette verge d’Aaron qui fleurit sans avoir été arrosée (Rom., xvii, 8) ? N’est-ce point Marie qui a conçu sans le concours de l’homme ? C’est de cette grande merveille qu’Isaïe prédit le mystère plus grand encore, quand il dit : « Il sortira un rejeton de la tige de Jessé et une fleur naitra de sa racine (Isa., xi, 1) ; » le rejeton pour lui c’était la Vierge, et la fleur, son enfantement.

6. S’il vous semble qu’on ne peut voir le Christ dans la fleur sans être en contradiction avec ce qui a été dit plus haut quand j’ai avancé que ce n’est pas la fleur du rejeton, mais le fruit de la fleur qui représente le Christ, je vous ferai remarquer que dans cette verge d’Aaron qui produisit non-seulement des fleurs, mais des feuilles et des fruits, le Christ n’est pas moins représenté par les fleurs et par les fruits que par les feuilles elles-mêmes. De même dans Moïse, ce n’est ni le fruit de sa verge ni sa fleur, mais sa verge elle-même, cette verge dont un coup divisait les eaux de la mer pour laisser un passage aux Hébreux, ou faisait jaillir l’eau du rocher pour étancher leur soif, qui figure le Christ (Exod., xiv, 16). Après tout il n’y a aucun inconvénient que, pour des causes différentes, le Christ soit figuré de manières différentes aussi. Ainsi la verge est le signe de la puissance et la fleur représente la bonne odeur qu’il répand, le fruit désigne combien il est doux à ceux qui le goûtent, et les feuilles rappellent la protection parfaite dont il couvre, à l’ombre de ses ailes, ceux qui se réfugient vers lui, soit pour échapper aux ardeurs des appétits de la chair ou pour se soustraire aux coups des impies qui les persécutent. L’ombre qu’on goûte sous les ailes de Jésus est bonne et désirable, on y trouve dans la fuite un refuge assuré, le frais et le repos dans la fatigue. Ayez pitié de moi, Seigneur Jésus, ayez pitié de moi, parce que mon âme a mis en vous toute sa confiance, et que j’espérerai Le Christ et Marie sont diversement figurés. à l’ombre de vos ailes jusqu’à ce que l’iniquité de et Marie nos ennemis soit passée (Psalm., lvi, 1). Toutefois, dans le passage d’Isaïe que nous avons cité, la fleur est le fils et le rejeton est la mère, attendu que le rejeton a fleuri sans germe, comme la Vierge a conçu sans l’homme ; d’un autre côté l’épanouissement de la fleur n’a nui en rien à la verdeur de la verge non plus que la naissance du fruit sacré des entrailles de Marie n’a porté atteinte à sa virginité.

Marie est la toison de Gédéon. 7. Citons encore quelques autres traits des saintes Écritures qui sont applicables à la Vierge-Mère et à Dieu son Fils. Que signifie la toison de Gédéon (Jud., vi, 37) ? Elle est détachée de la peau de l’agneau, mais la peau elle-même demeure intacte, elle est étendue sur le sable, et tantôt c’est elle, tantôt c’est le sable qui reçoit toute la rosée du Ciel ; qu’est-ce autre chose que la chair qui naquit de la Vierge sans porter atteinte à sa virginité ? N’est-ce pas dans son sein que descendit la plénitude de la divinité, quand les Cieux la laissèrent descendre comme une rosée sur la terre ? C’est de cette plénitude que nous avons tous reçu, et sans elle nous ne serions tous qu’une terre aride. Au fait de Gédéon semble se rapporter assez bien aussi cette parole du Prophète : « Il descendra comme la pluie sur une toison (Psalm., lxxi, 6), » car ce qui suit : « et comme l’eau qui tombe goutte à goutte sur la terre, » parait désigner la même chose que