Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/325

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exciper de sa conversion pour altérer le lien qui l’engage ; le contrat primitif est imprescriptible, et la conversion, loin d’y porter atteinte, y est une prévarication.

Les peuples qui pratiquent le divorce sans périls sont des monstres ou des prodiges de vertu ; ceux qui admettent la séparation se jouent de l’esprit du serment. Pourquoi vous séparez-vous si vous ne vous quittez point ? Les séparations outragent non seulement la nature, mais la vertu ; on se sépare le plus souvent pour tromper ses créanciers.

CHAPITRE IX.

DES MARIAGES CLANDESTINS

Le faux honneur des monarchies a créé les mariages clandestins. C’était encore un vice de la République romaine que l’austère orgueil des ordres qui ne leur permettait pas de s’allier. Rome était remplie de lois dangereuses qui devaient la perdre après qu’elles l’auraient élevée. Ce ne fut point César qui asservit sa patrie, ses lois étaient seulement dégénérées, et Rome marchait à grands pas vers la monarchie.

Vers le déclin de l’empire, il parut cette fameuse loi, movemur diuturnitate et numero liberorum ; toute belle et sublime qu’elle était en elle-même, elle fut inutile ; l’honneur la fit taire, elle n’encouragea que le mal.

Les mariages clandestins ne méritent d’effets civils ni dans la monarchie ni dans la république ; les lois ne peuvent rien permettre qui soit caché ; détrompez le ridicule honneur et le fol intérêt, vous n’aurez plus besoin de lois violentes.

Les États despotiques qui n’ont point d’honneur ne connaissent point la clandestinité des mariages ; c’est un malheur de l’esclavage ; il est des États libres qui la connaissent, c’est un malheur de la liberté.