Page:Saint-Just - Œuvres complètes, éd. Vellay, I, 1908.djvu/375

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que les nations étrangères sont par rapport à lui, depuis que les traites ont été reculées aux frontières.

Il viendra peut-être un temps où l’on ne verra point du tout de traites, et où les peuples comme les individus concevront aussi qu’ils sont frères.

Alors les nations ne seront plus rivales, il n’y aura plus qu’un droit commun dans l’univers ; de même qu’il n’y a plus parmi nous que des Français, il n’y aura plus dans le monde que des humains. Les noms des nations seront confondus, la terre sera libre.

Mais alors aussi les hommes seront devenus si simples et si sages qu’ils nous regarderont, tout philosophes que nous sommes, de l’œil dont aujourd’hui nous voyons les peuples de l’Orient, ou les Vandales et les Huns ; car dans le monde, quelque confus qu’il paraisse, on remarque toujours un dessein de perfection, et il me paraît inévitable, qu’après une longue suite de révolutions, le genre humain, à force de lumières, ne revienne à la sagesse et à la simplicité.

CHAPITRE VIII.

DES FORÊTS

Les forêts, fruits de l’économie des siècles derniers, étaient, au commen­cement de celui-ci, une des ressources de l’industrie française ; elles enrichirent les manufactures et la marine ; elles réparèrent un peu les pertes qu’avaient faites les grandes maisons du temps de Law ; elles fournirent aux excessives dépenses des grands et des nobles sous Louis XV, mais le produit n’en était pas inépuisable. Les bois sont aujourd’hui ravagés pour la plupart ; ils étaient hors de prix dans les derniers temps, et surtout dans la capitale. Paris irritait, par l’appât de son séjour, l’opulence et les ressources des riches, et ceux-ci retrouvaient au poids de l’or les denrées que leur nécessiteuse avarice mettait à une dure enchère dans les provinces.

Si le luxe ne diminue point en France, ou si les riches y demeurent oisifs, les forêts, sur lesquelles le luxe influe autant que