Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/283

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

à table : mes hôtes me demanderent la permission de faire manger leurs domestiques & même les miens avec moi ; j’y consentis. La table étoit servie proprement ; elle étoit couverte de poudings & de légumes, & d’un rôti de bœuf : tous ces mets avoient le meilleur air du monde ; les sièges étoient commodes ; mais il n’y avoit qu’un fauteuil qui étoit destiné à un vieillard qu’on me présenta : c’étoit le pere du fermier ; il me fit un accueil fort honnête, & nous nous assîmes.

J’étois auprès de la fermiere : je remarquai qu’elle envoya une jeune servante se placer auprès d’un jeune berger : je demandai si c’étoient de nouveaux mariés. Ils ne sont pas mariés, dit-elle ; mais ils s’aiment, ils ne se sont pas vus de la journée, & ils auront du plaisir à être assis l’un auprès de l’autre. Je vis qu’elle envoyoit à un de ses valets un plat qu’il aimoit beaucoup & qui étoit là pour lui seul : elle fit donner du cidre à ceux dont les travaux avoient été les plus pénibles : elle rendoit raison du choix des mets qui étoient servis ; elle disoit pourquoi, ce jour-là, certains légumes ne paroissoient pas sur la table, pourquoi elle en avoit préféré d’autres, pourquoi elle avoit donné un certain assaisonnement : c’é