Page:Saint-Lambert - Les Saisons, 1775.djvu/306

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nouvel état que je voulois embrasser. Je ne vous peindrai point sa joie, sa reconnoissance & mon bonheur, lorsque je l’eus déterminé à m’épouser. Jamais on n’a rien écrit avec plus de joie que j’en eus à écrire mon testament ; jamais on n’acquit tout-à-coup une grande fortune avec autant de plaisir que j’en eus à me dépouiller de la mienne.

Après avoir fini mes affaires, nous partîmes pour Londres. J’y fis répandre le bruit de ma mort & je le rendis vraisemblable par une adresse & des moyens qu’il est inutile de vous dire. Nous arrivâmes enfin en Ecosse. Il y a sept ans que j’entrai, pour la première fois, dans cette chère métairie, & que, pour la première fois, j’embrassai les genoux de cet excellent vieillard que vous voyez sur cette pierre se pénétrant des premiers rayons de Soleil, & cherchant à se ranimer par les douces influences de l’aurore & du printems. Vous voyez votre fille, lui dis-je, elle vient dans votre maison pour y rendre votre vieillesse heureuse & pour faire, toute sa vie, le bonheur de votre fils : mon cœur m’inspirera tout ce qu’il faut pour vous plaire à tous deux. Vous, mon mari, vous m’instruirez des détails du ménage ; je me flatte que je serai une ménagère vigilante,