Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/324

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pour tout ce qui n’étoit pas titré. Cela a duré jusqu’à l’éclipse des secrétaires d’État à la mort de Louis XIV.

M. de Turenne maria le comte d’Auvergne, son neveu, à la fille unique et seule héritière du prince de Hohenzollern, marquis de Berg-op-Zoom par sa femme. Cette grande terre en Hollande avec beaucoup d’autres biens, avec une alliance étrangère, entée sur celle de la mère et la grand’mère, parut au vicomte un établissement pour son neveu cadet, qui pouvoit en son temps avoir de grands avantages. Il ne tarda pas à lui faire accorder ses survivances de la charge de colonel général de la cavalerie et de son gouvernement de Limousin. On a vu (t. II, p. 164) avec quelle adresse lui et son troisième neveu mirent le roi en situation de leur offrir pour lui sa nomination au cardinalat, et de s’en croire quitte à bon marché en la lui donnant, et la charge de grand aumônier deux ans après. C’est-à-dire qu’il fut cardinal à vingt-cinq ans, et grand aumônier à vingt-sept. Tels furent les établissements que M. de Turenne procura à sa maison, à ses trois neveux et à soi-même. Mais parmi tant de splendeur, il reçut quelques déplaisirs. Ses deux derniers neveux, enflés d’une situation si brillante, furent tous deux tués en duel ; et il eut la douleur que, mariant leur sœur à M. d’Elboeuf, jamais M. de Lorraine ne voulurent passer à la future ni aux siens les qualités de prince et de princesse. Le mariage en fut rompu, puis renoué, mais avec la même opiniâtreté de la part des Lorrains. À la fin, M. de Turenne céda, et conclut le mariage avec la douleur du bruit que cela fit dans le monde. Il trouva depuis le moyen de marier son autre nièce, sœur de celle-ci, à un frère de l’électeur de Bavière, l’un et l’autre morts sans enfants. Je ne sais si la maison de Bavière eut la même délicatesse que la maison de Lorraine, ni si celle-ci l’a soutenue au contrat de mariage de M. de Bouillon, père de celui-ci, avec sa troisième femme, fille du comte d’Harcourt, dit depuis le comte de Guise.