Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 5.djvu/405

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étoient au jardin ; elles ne trouvèrent plus de fauteuil en rentrant. On étoit debout et aux embrassades pour prendre congé.

Par le chemin, Mlle de Beaujolois vécut en princesse du sang. Mais arrivées à Paris, elles trouvèrent que ce fauteuil y avoit fait grand bruit, et que là-dessus les princesses du sang le prétendoient chez la reine d’Espagne. Mme la duchesse d’Orléans, dont les enfants n’étoient plus petits-fils de France, trouvoit la prétention fort raisonnable, d’autant qu’elle en formoit de plus étranges pour elle-même, jusqu’à ne pas vouloir que les gardes de la reine sa fille prissent la salle de ses gardes quand elle la venoit voir au Palais-Royal, tandis qu’à Versailles on ne leur disputa pas d’être mêlés avec ceux du roi, et la droite dans leur salle. Cette prétention du fauteuil, soutenue de l’autorité d’un prince du sang pleinement administrateur de l’État, suspendit les visites. Un écrivit en Espagne, d’où il vint défense à la reine d’Espagne de donner des fauteuils, même à Mme la duchesse d’Orléans sa mère, qui depuis ne l’a plus vue qu’en particulier, et pas un prince ni princesse du sang ne l’ont visitée, si ce n’est M. le duc d’Orléans et Mlles ses soeurs, mais en dernier particulier.

Voilà où conduisent des complaisances mal entendues. Mme la duchesse d’Orléans n’a jamais eu ni prétendu qu’un tabouret devant les filles de France, même cadettes, même devant Mme la duchesse de Berry sa fille ; les princesses filles de Gaston pareillement devant Madame, ainsi que Mlle la duchesse d’Orléans, et Mlle depuis duchesse de Lorraine ; les princes et les princesses du sang n’ont jamais eu ni prétendu qu’un siège à dos, sans bras, devant les filles de Gaston, devant M. et Mme la duchesse d’Orléans, et devant Mlle depuis duchesse de Lorraine ; et ils veulent un fauteuil devant les têtes couronnées, et en particulier devant la petite reine d’Espagne, qui, sa couronne mise à part, est veuve d’un infant d’Espagne, c’est-à-