Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 6.djvu/260

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Elle comptoit bien, dès qu’elle seroit veuve, de se retirer entièrement, mais le roi s’y opposa si fortement qu’il fallut demeurer. Ce ne fut pas pour longtemps ; de grandes infirmités la tirèrent de la cour ; [ce] dont elle fit le plus saint usage et le plus solitaire, et mourut ainsi avant ses deux années de deuil.

Elle n’avoit que deux filles : toutes deux de beaucoup d’esprit, fort dangereuses, fort du grand monde, fort galantes, qui avoient été filles d’honneur de Mme la dauphine de Bavière, et qui n’avoient rien. L’une épousa un vilain milord Stafford, qui étoit Howard, qui passoit sa vie à Paris aux Tuileries et aux spectacles, et que personne ne vouloit voir, avec qui elle se brouilla bientôt et s’en sépara. Depuis sa mort elle alla vivre en Angleterre de ce qu’il lui avoit donné, en l’épousant, et n’en eut point d’enfants. L’autre se fit chanoinesse et abbesse de Poussay, où elle s’est convertie et a vécu dans une grande pénitence et bien soutenue. Comme elles n’avoient rien, leur mère écrivit en mourant au roi et à Mme de Maintenon pour leur demander pour elles sa pension du roi. De ces deux lettres, l’une fut dédaignée, l’autre négligée : Tel est le crédit des mourants les plus aimés et les plus distingués durant leur vie. Il n’y eut ni réponse ni pension.




CHAPITRE XIII.


Éclat entre Chamillart et Bagnols, qui en quitte l’intendance de Flandre et met Chamillart en danger. — Mariage de Courcillon avec la fille unique de Pompadour. — Leur caractère et leur situation. — Mariage, état, caractère de Lanjamet et de sa femme. — Mariage