Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 6.djvu/377

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et cela par l’impétuosité de la cour de Vienne. Mais il avoit fallu trop de machines et de temps pour nous mettre et nous arranger cette ligue dans la tête. Le roi ne fit qu’accepter tard et avec peine un projet qu’il eût dû former, proposer et presser. Il perdit un temps le plus précieux à employer qu’il eût peut-être eu de tout son règne. La démarche éclatante qu’il en fit enfin, au lieu de ne l’avoir apprise que par les effets, alarma les alliés. Ils sentirent tout le poids d’une diversion si puissante. Hormis la Flandre, où ils s’étoient trop engagés pour pouvoir reculer, ils cessèrent de songer à rien faire d’aucun auge côté, jusqu’à ce qu’ils se fussent mis en sûreté de celui de l’Italie.

Cependant le pape, encouragé et fatigué de la lenteur de ses alliés d’Italie, leur voulut donner un exemple qui les pressât de l’imiter. Il leva des troupes de tous côtés, munit ses places, fortifia divers postes, prit à son service des officiers généraux partout où il put. Il tâcha de suspendre le luxe et de tirer de l’argent des cardinaux riches. Il obtint, quoique avec peine, les suffrages et les signatures du sacré collège pour tirer du château Saint-Ange le trésor que Sixte V y avoit amassé et laissé pour les plus grands besoins de l’Église. Il y avoit cinq millions d’or, il se servit de cinq cent mille écus à payer ses troupes et aux préparatifs de guerre qu’il commença et fit assez heureusement contre ce peu d’Impériaux épars par Italie. Leur gros étoit dans l’armée du duc de Savoie. N’allons pas maintenant plus loin de ce côté-là, et revenons à Fontainebleau et en Flandre.

Le duc de Berwick, établi dans Douai, étoit arrivé trop tard pour sauver l’Artois des courses et des contributions. Sa présence servit seulement à les en faire retirer avec plus d’ordre, sans leur faire rien perdre de leur butin. Leur gros s’étoit établi à la Bassée, d’où ils avoient pensé surprendre Dourlens, et s’étendre alors en Picardie. Ils s’étoient aussi rendus maîtres d’un faubourg d’Arras et avoient manqué