Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/113

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que sa propre cour ne porte pas, après n’en avoir point porté ici d’aucuns des enfants de la reine morts avant sept ans.

Le marquis de Nesle épousa la fille unique du duc de Mazarin, qui n’avoit qu’un frère. La comtesse de Mailly avoit fort espéré ce mariage pour sa dernière fille, et y avoit fait de son mieux, un peu aidée des cajoleries de Mme de Maintenon ; mais la vieille Mailly, qui savoit par expérience combien elles étoient vaines, et qui avoit, à force de travaux, fait une très puissante maison, voulut pour son petit-fils de grandes espérances. Les biens étoient immenses si le frère venoit à manquer, et de plus l’espérance de la dignité de duc et pair, parce que celle de Mazarin étoit femelle. La beauté de cette mariée fit grand bruit dans les suites, et celle des filles quelle laissa encore plus dans le règne suivant, jusqu’à devoir y tenir quelque place dans l’histoire.

Le duc de Charost fut attrapé par une Mme Martel, vieille bourgeoise de Paris, qui étoit un esprit, et qui voyoit assez bonne compagnie. Avec un empire fort ridicule à considérer, elle lui fit accroire des trésors pour son deuxième fils qui n’avoit rien alors, et qui par l’événement a succédé aux dignités et aux charges de son père. Je ne dirai pas aux biens pour le peu qu’ils valoient. Bref, Charost se laissa embarquer, et maria le marquis d’Ancenis à la fille d’Entragues, qui avoit été petit commis, et bien pis auparavant, chez M. de Frémont, beau-père de M. le maréchal de Lorges, et grand-père de Mme de Saint-Simon, qui lui avoit commencé une fortune qu’il poussa fort loin, et qui lui fit épouser pour rien la fille de Valencey et d’une sœur du maréchal de Luxembourg et de la duchesse de Meckelbourg. Charost avoit eu le gouvernement de Dourlens de Baule-Lamet, père de sa seconde femme, dont il ne lui restoit point d’enfants, que le roi voulut bien sur sa démission donner à son fils en faveur de ce mariage. Il fut récompensé. autant qu’il pouvoit l’être par le mérite, de la personne, sa vertu et sa conduite,