Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/319

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

longue main. La cabale de Meudon, dont j’ai montré les raisons, menoit, ou se faisoit redouter de tout ce qui approchoit d’un prince qu’elle gouvernoit, dont l’intelligence étoit nulle, à qui on persuadoit les choses les plus éloignées de toute apparence, et dont l’année suivante fournira un exemple qui peut être dit prodigieux. Mlle Choin n’avoit garde de ne pas suivre Mme la Duchesse et ses deux amies si intimes, Mlle de Lislebonne et Mme d’Espinoy, en chose qui leur importoit si fort, à la première de haine, aux deux autres et à elle-même de politique, et de ne seconder pas encore une fois Mme de Maintenon, avec laquelle elle étoit restée unie depuis l’affaire de la disgrâce de Chamillart, qui, sans oser rallier comme à l’égard de ce ministre, eut soin de se montrer assez aux gens dont elle compta faire usage pour faire presque le même effet sur eux, que plus à découvert elle avoir obtenu contre le ministre. Elle n’oublia pas les ressorts intérieurs des cabinets du roi qu’elle avoir si utilement su remuer contre Chamillart. M. du Maine y avoit le même intérêt qui l’avoit si vivement, mais si cauteleusement mis en mouvement en faveur du duc de Vendôme contre Mgr le duc de Bourgogne, et, en cette occasion-ci, au lieu d’avoir à se cacher de Mme de Maintenon, il en avoit l’aveu et le désir. Toute leur peine fut de ne pouvoir associer ce prince à leurs cris. Il demeura ferme à vouloir des preuves et de l’évidence, à soutenir que, quand bien même il s’en trouveroit de telles, il falloit cacher, non pas manifester à leur honte commune le crime du sang royal. Il est pourtant très certain que la partie étoit faite pour le répandre, à tout le moins de le déshonorer par une condamnation et par la prétendue clémence d’une commutation de peine qui anéantit le duc d’Orléans pour jamais. Force gens y trouvoient leur compte pour les futurs contingents, quelques-uns pour leur haine, les deux dominatrices surtout deçà et delà des Pyrénées pour leur vengeance.