Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 7.djvu/381

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Attentifs en même temps à ce qu’ils avoient compté qui arriveroit au centre, ils firent sortir de ce bois qui étoit au bout de la petite plaine, qui étoit vis-à-vis des deux trouées et de notre centre, beaucoup d’infanterie dont ils l’avoient farcie sans que nous l’eussions pu apercevoir, laquelle fondit sur ces brigades des gardes françaises et suisses, et sur celle de Charost où le marquis de Charost fut tué d’abord, de la résistance desquelles on ne paria pas bien, et qui furent culbutées presque aussitôt qu’attaquées par un e grande supériorité de nombre.

Malgré le désordre de notre gauche on y combattoit toujours, et elle vendoit son terrain chèrement lorsque le maréchal de Villars y reçut une grande blessure au genou, Albergotti une autre qui les mirent hors de combat, et Chemerault tué, tout cela à cette gauche dont la défaite, déjà bien avancée alors, ne tint presque plus depuis, malgré les efforts et les exemples du roi Jacques d’Angleterre.

À la droite, le combat fut très vif ; le maréchal de Boufflers, après avoir vaillamment repoussé l’infanterie qui l’avoit attaqué, avoit renversé la cavalerie qui étoit venue la soutenir, et gagné un grand terrain ; il traita de même d’autre cavalerie qui s’étoit présentée devant lui, et jusqu’à trois fois de suite avec le même succès, lorsque, tout occupé de pousser sa victoire, il apprit la défaite du centré et le désastre de la gauche, déjà toute ployée par la droite des ennemis, la retraite de la personne de Villars hors du combat par sa blessure, et que le poids de tout portant désormais sur lui seul, c’étoit à lui à tirer [l’armée] des précipices où Villars l’avoit engagée.

Outré alors de se voir la victoire, qu’il tenoit déjà, arrachée de la main, et par des mains françaises, frappé des affres du péril où se trouvoit l’État par celui où il voyoit l’armée, il se mit à inspirer l’audace aux divisions de son aile par de courts propos en passant ; et, s’abandonnant à