Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 9.djvu/429

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Contade à la cour ; son caractère. — Siège de Bouchain ; Ravignan dedans ; sa situation personnelle ; son caractère. — Bouchain rendu ; la garnison prisonnière ; générosité des ennemis à l’égard de Ravignan. — Fin de la campagne en Flandre. — Villars assez bien reçu à la cour, et pourquoi.


La charge vacante eut plusieurs prétendants. Je hasardai de m’en mettre par une lettre que je présentai au roi. Il me revint aussitôt qu’elle lui avoit plu assez pour me donner de l’espérance ; mais M. de Beauvilliers, sans qui je ne faisois rien d’important, et qui m’y avoit exhorté à tout hasard, me la diminua bientôt. Le maréchal étoit mort le 22 août. Le vendredi matin, 4 septembre, le roi travailla à l’ordinaire avec le P. Tellier, puis envoya chercher le Dauphin. Il lui dit qu’en l’âge où il étoit, ce n’étoit plus pour soi qu’il devoit faire des choix de gens qui ne le serviroient guère, mais qui serviroient le Dauphin toute leur vie ; qu’ainsi il vouloit lui donner un capitaine des gardes à son gré, et qu’il ordonnoit de lui dire franchement à qui des prétendants il donnoit la préférence. Le Dauphin, après lui avoir fait les réponses convenables, lui nomma le duc de Charost comme celui qui lui étoit le plus agréable, et dans l’instant il l’obtint. Le roi passa ensuite chez Mme de Maintenon ; il y fit appeler Charost, lui donna la charge avec cinq cent mille livres de brevet de retenue pour en payer autant qu’en avoit le maréchal de Boufflers, lui dit qu’il devoit cette préférence au Dauphin, à qui il avoit laissé le choix, et lui ordonna d’envoyer sur-le-champ cette nouvelle à son père, à qui elle feroit grand plaisir.

Charost étoit lieutenant général, mais ne servoit plus depuis longtemps. Il n’étoit pas même sur un pied avec le roi a se faire craindre aux prétendants de la charge ; ce fut donc un étonnement extrême et un bourdonnement étrange, et en même temps un événement qui imprima à toute la cour un grand respect pour le Dauphin et une persuasion parfaite de tout ce qu’il pouvoit. Un nommé Domingue,