Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 9.djvu/431

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de digression sur la singulière et curieuse fortune de ces MM. de Charost.

Le comte de Charost, grand-père de celui-ci, étoit quatrième fils, mais tenant lieu de second fils du frère du premier duc de Sully, ministre favori d’Henri IV. Ce frère, qui étoit catholique, fut célèbre par ses nombreuses et importantes ambassades, par les succès qu’il y eut et par ses emplois considérables dans les armées ; chevalier du Saint-Esprit en 1609, et mort à quatre-vingt-quatre ans, en 1649. Charost, son cadet, ne pouvoit pas espérer grand bien de lui. Le fameux procès que le comte de Soissons intenta au prince de Condé, duquel M. de Sully avoit pris la défense auprès d’Henri IV, qui le rendit partial, et dont le comte de Soissons ne pardonna jamais le succès au favori, avoit lié une amitié intime entre ce dernier et L’Escalopier, qu’il avoit fait nommer rapporteur du procès, et qu’il en fit récompenser d’une charge de président à mortier au parlement de Paris. L’Escalopier avoit une fille fort riche, dont M. de Sully, qui ne mourut qu’à la fin de décembre 1641, fit le mariage avec le comte de Charost, son neveu, en février 1639. Ce comte de Charost se trouva un homme de mérite qui se distingua fort dans toutes les guerres de son temps, et qui y eut toujours des emplois considérables. Il s’attacha au cardinal de Richelieu, jusqu’à s’en faire créature ; cette protection lui valut la charge de capitaine des gardes du corps, dont se défit, en 1634, le comte de Charlus, bisaïeul du duc de Lévi, et deux ans après, Calais.

Le cardinal Mazarin, qui se piqua d’aimer et d’avancer tout ce qui avoit particulièrement été attaché au cardinal de Richelieu, rechercha l’amitié du comte de Charost, et le mit en grande considération auprès de la reine mère, et ensuite auprès du roi, qui le regardèrent toujours comme un homme de tête et de valeur, et d’une fidélité à toute épreuve. Il se fit un principe de demeurer uni avec tout ce qui avoit tenu au cardinal de Richelieu, qu’il appeloit toujours son