Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1856, octavo, tome 9.djvu/84

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des noms des principaux juges, trouva l’arrêt mauvais, s’inquiéta fort du chagrin de Mme la Duchesse et de l’état des affaires de ses enfants, lui dépêcha un message, ne se contraignit pas le soir au cabinet d’en montrer son dépit à M. du Maine, et de le laisser remarquer à tout le monde plusieurs jours de suite.

Mme la duchesse d’Orléans, à qui M. du Maine avoit envoyé un courrier sur-le-champ, me le manda à l’instant même. L’arrêt laissoit des queues cruelles à démêler à Mme la Duchesse, qui eurent de fortes suites.

M. du Maine consulta longtemps à l’hôtel de Conti leurs affaires communes en conséquence de l’arrêt, et alla de là chez Mme la Princesse. Il lui témoigna, avec cette vérité qu’on connoissoit en lui, qu’il ne pouvoit sentir de joie dans un événement qui donnoit du déplaisir à Mme la Duchesse, avec tous les compliments si aisés à faire quand on a vaincu et qu’on nage dans la joie. Mme la Princesse ne lui conseilla pas de voir Mme la Duchesse dans ces premiers instants, et se chargea des compliments. Il vint coucher à Versailles, où il déclara qu’il n’en recevroit aucuns, avec une modestie qui ne trompa personne.

Mme la Duchesse donna plusieurs jours à Paris à sa douleur et à ses affaires. Elle fut longtemps à se remettre d’un revers que le triumvirat et que Monseigneur qualifièrent d’affront. On chercha à renouer un accommodement pour éviter une hydre de procès qui naissoit du jugement de celui-ci ; mais le surcroît d’aigreur y fut un obstacle invincible.

Les tenants de Mme la Duchesse se lâchèrent en propos qui ne demeurèrent pas sans repartie, et sa consolation fut de se venger un jour des injures du barreau par Monseigneur. M. du Maine me conta, peu de jours après à Marly, que le parti de Mme la Duchesse s’exhaloit en injures contre lui, et publioit qu’il avoit fait agir maîtresses et confesseurs, qu’il avoit soulevé jusqu’aux jansénistes, en mémoire