Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 10.djvu/326

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

vit encore dans un grand âge, confiné dans son archevêché d’Alby, où il est fort aimé, commandeur de l’ordre, et ayant refusé Toulouse et Narbonne. Mme la duchesse de Berry prit en même temps Longepierre pour secrétaire de ses commandements, manière de bel esprit de travers, et de fripon d’intrigue, dont on a déjà parlé et dont on pourra parler encore.

Frédéric III, électeur de Brandebourg, né en 1657, mourut le 25 février de cette année. Celui d’aujourd’hui est son petit-fils. Il suivit les traces de l’électeur son père dans son opposition à la France et dans son attachement à la maison d’Autriche. Il servit puissamment l’empereur en toutes occasions, et aux guerres de Hongrie et du Rhin. Il se trouva le plus puissant des électeurs et celui que l’empereur avoit le plus à ménager. Cela lui fit imaginer de se déclarer lui-même roi de Prusse, comme on l’a dit en son temps, après s’être assuré de l’esprit et de la reconnoissance de l’empereur en cette qualité, et de plusieurs princes de l’empire, et se déclara roi lui-même le 18 janvier à Kœnigsberg, capitale de la Prusse ducale, en un festin qu’il y donna à ses premiers généraux et à ses ministres, et aux principaux seigneurs de cette Prusse et de ses autres États. De trois femmes qu’il épousa, il eut son successeur, père de celui d’aujourd’hui, d’une Nassau, tante paternelle du prince d’Orange devenu depuis roi d’Angleterre, à la succession duquel les électeurs de Brandebourg ont prétendu par là. Frédéric n’eut pas la joie d’être reconnu roi de Prusse par la France et l’Espagne ; il mourut avant la paix de ces deux couronnes avec l’empereur et l’empire, qui ne fut conclue qu’un an après, et par laquelle son fils fut reconnu partout roi de Prusse.

Les électeurs de Cologne et de Bavière arrivèrent : le premier à Paris, dans une maison du quartier de Richelieu que son envoyé lui avoit meublée ; l’autre, dans une petite maison à Suresne, dans leur incognito ordinaire. Peu de jours