Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 10.djvu/404

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été aussi peu d’accord avec Polignac qu’à Gertruydemberg, et l’avoit traité avec une humeur et une hauteur qui ne convenoit pas à l’égalité de leur caractère, et moins encore à l’inégalité de leur naissance. Polignac, qui voyoit la pourpre s’approcher de lui de plus en plus, glissa sur tout avec accortise sans céder sur les affaires ; il évita sagement l’éclat et la brouillerie ouverte, mais ils ne se sont guère vus depuis, et n’ont pas montré faire grand cas l’un de l’autre. Ménager n’oublia point avee eux ce qu’il étoit, et ne se laissa point gâter par son égalité monstrueuse de caractère ; il les satisfit également l’un et l’autre avec beaucoup d’art, de douceur et de déférence ; et, bien que plus penché par Polignac par la douceur de ses mœurs, et aussi sur le fond des affaires et la manière de les conduire, qui venoit toute mâchée de Torcy, mais où le maréchal vouloit toujours mettre du sien, Ménager ne fut pas inutile entre eux, et servit très-bien pour les choses du commerce qui étoient peu connues des deux autres, et dont il étoit particulièrement chargé. Il fut donc fort bien reçu, et eut en arrivant une pension de dix mille livres.

Sainctot mourut subitement à quatre-vingt-cinq ou six ans. C’étoit une famille plébéienne. Il avoit eu un frère conseiller au parlement. Il avoit été longtemps maître des cérémonies. On a pu voir (t. II, p. 80) quelle avoit été sa probité dans cette charge, et la friponnerie avérée de ses registres qu’il fut forcé d’avouer et de réparer. C’étoit un homme tout doucereux, et avec cela tout avantageux, tout esclave de la faveur aux dépens de vérité et de justice, et qui se croyoit en droit de favoriser qui il lui plaisoit en passe-droits. Il eut tant de discussions avec Blainville du temps qu’il étoit grand maître des cérémonies, auquel il tâchoit toujours de s’égaler, qu’il fut contraint de vendre sa charge de maître des cérémonies. Il acheta en même temps une des deux d’introducteur des ambassadeurs, où il fit maintes sottises, comme on a vu (t. II, p. 78 et suiv.), entre