Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 10.djvu/447

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ennemis gagnèrent en septembre 1710 ; il n’étoit point marié. Son frère lui succéda au titre de duc d’Havré, à la grandesse, et au régiment des gardes wallones. La princesse des Ursins lui fit épouser la fille de sa sœur, la duchesse Lanti, qu’elle fît venir en Espagne, et qu’elle fit dame du palais. Quelque temps après la disgrâce de Mme des Ursins, on voulut faire quelques changements considérables dans les gardes wallones, fort désagréables à ce régiment ; le duc d’Havré s’y opposa avec tant d’opiniâtreté que le régiment lui fut ôté, et donné au prince de Robecque, comme on a vu ci-devant. Comme il étoit adoré dans ce régiment, le marquis de Lavère, frère du prince de Chimay qui en étoit lieutenant-colonel, et lieutenant général dans les troupes d’Espagne, quitta avec toute la tête et dans le reste tout ce qu’il y avoit de meilleur. Le duc d’Havré revint en France avec sa femme, qui perdit sa place de dame du palais. Ils se retirèrent dans leurs terres de Picardie, où le duc d’Havré mourut sans avoir paru à la cour ni dans le monde. Sa veuve s’appliqua fort à raccommoder les affaires de cette famille qui étoient fort délabrées. Elle est sœur du prince de Lanti que Mme des Ursins avoit fait grand d’Espagne par un mariage à Madrid, et du cardinal Lanti qui vient d’être promu fort jeune, et qui vit à Rome. Elle a marié ses deux fils : l’aîné à une fille du maréchal de Montmorency ; l’autre en Espagne à la fille unique de son frère, qui le fait grand d’Espagne, et où il s’est allé établir. Le duc d’Havré a un régiment, jouit ici de son rang de grand d’Espagne, et n’a jamais eu non plus que son père ni sa mère, les chimères de princerie de son cousin le prétendu prince de Croï.

Peu de temps après que le roi fut à Fontainebleau, j’appris qu’il paraissoit sous le manteau un mémoire de M. de La Rochefoucauld sur sa prétention d’ancienneté contre moi, où l’avocat s’étoit, faute de meilleures raisons, laissé aller à quelques impertinences ; et j’en fus assuré par une