Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 11.djvu/285

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vient de parler, et que les assemblées devinrent telles qu’on vient de l’expliquer un moment avant de parler des capitulaires, l’excès des procès qui se multiplièrent de plus en plus, et par même cause les ordonnances diverses et les différentes coutumes des différentes provinces, devinrent tellement à charge aux pairs et à ceux des hauts barons qui étoient appelés à ces assemblées, que saint Louis, qui aimoit la justice, fit venir des légistes pour débrouiller ces procès et les simplifier, et faciliter aux pairs et aux hauts barons le jugement par la lumière qu’ils leur communiquoient.

Ces légistes étoient des roturiers qui s’étoient appliqués à l’étude des lois, des ordonnances, des différents usages des pays, ce qui fut depuis appelé coutumes, qui conseilloient les feudataires particuliers dans le jugement qu’ils avoient à rendre avec leur suzerain, d’où peu à peu sont dérivées les justices seigneuriales ou hautes justices des seigneurs, en images très imparfaites de celles qu’ils rendoient avant que petit à petit les rois les eussent changées par leur autorité, après le changement dans la forme de la milice et après la réunion de plusieurs grands fiefs à leur couronne.

Ces légistes étoient assis sur le marchepied du banc sur lequel les pairs et les hauts barons se plaçoient, pour leur donner la facilité de consulter ces légistes sans quitter leurs places et sur-le-champ. Mais cette consultation étoit purement volontaire, ils n’étoient point obligés de la suivre, et ces légistes, bien loin d’opiner, n’avoient autre fonction que d’éclaircir les pairs et les hauts barons à chaque fois et sur chaque point qu’ils s’avançoient à eux, sans se lever pour l’être, après quoi ou sans quoi ils opinoient comme il leur sembloit, en suivant ou au contraire de ce qu’ils avoient appris des légistes sur ce qu’ils les avoient consultés. De là leur est venu le nom de conseillers, de ce qu’ils conseilloient les pairs et les hauts barons quand ils vouloient leur demander éclaircissement, non de juges qu’ils n’étoient pas ;