Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/186

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de raisons transcendantes qui en emportoient la démonstration ; qu’à l’égard de l’affaire de la constitution, c’étoit à lui-même à qui j’aurois voulu demander ce qu’il en pensoit, ou plutôt que je n’en avois pas besoin, parce qu’il me l’avoit dit bien des fois, avec l’indignation qu’en méritoient les artifices, les friponneries, les violences dont toute cette affaire n’étoit qu’un tissu ; que ce n’étoit pas à un prince éclairé comme il l’étoit à se laisser imposer par une odieuse cabale détestée de tous les honnêtes gens, même de ceux que la faiblesse ou l’intérêt y avoit engagés ; que c’étoit la partie saine, savante, pieuse du royaume avec qui il avoit à compter sur les affaires ecclésiastiques, qui demandoient des mains pures et reconnues universellement pour telles, au péril de perdre toute réputation et toute confiance dès ce premier faux pas. J’ajoutai que je ne voyois point de prélat qui fût tout ensemble assez marqué, assez distingué par les lumières, assez porté par la vénération publique, pour entrer en aucune comparaison avec le cardinal de Noailles ; et qu’à l’égard des cardinaux de Rohan et de Bissy, c’étoit à lui-même à voir si les affaires ecclésiastiques seroient sûrement en remettant leur direction principale et la feuille des bénéfices à deux ambitieux esclaves de la cour de Rome : le premier qui ne respiroit que la grandeur de sa maison et de ses chimères, l’autre d’en faire une, tous deux de dominer le clergé et la cour, et d’être chefs de parti, tous deux liés et livrés à ce qui lui étoit le plus contraire autour du roi et dans le public ; sur quoi il devoit de plus savoir à quoi s’en tenir sur les Rohan.

Passant de là aux partis que formoit la constitution, je lui fis sentir toute la différence de la réputation de tout temps et publique des prélats unis au cardinal de Noailles d’avec les autres ; le poids de la Sorbonne, des autres écoles, des curés de Paris, si importants et si fort à ménager dans des temps jaloux, de la foule du second ordre, des corps réguliers illustres par leur science et leur piété ; enfin celui des