Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/23

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femmes, accourut chez ces exilés, au moment que la chose fut sue, et que personne ne se méprit a l’auteur, qui encourut de plus en plus la haine et la malédiction publique.

L’électeur de Bavière alla, de sa petite maison de Saint-Cloud, voir la reine de Pologne, sa belle-mère, qu’il n’avoit jamais vue. Il ne coucha point à Blois, où elle étoit, et s’en revint aussitôt. Il étoit pressé de retourner à Compiègne faire le mariage du comte d’Albert avec Mme de Montigny, sa maîtresse publique depuis bien des années. Elle étoit des bâtards de Brabant, sœur du feu prince de Berghes, grand d’Espagne, et chevalier de la Toison d’or, gendre du duc de Rohan-Chabot. Le comte d’Albert n’avoit rien, l’électeur le faisoit subsister. Il trouvoit de grands biens dans ce mariage, dont l’infamie avoit toujours été rejetée par le duc de Chevreuse avec toute l’indignation qu’elle méritoit. Sa mort leva le principal obstacle ; il passa sur tous les autres. Outre les solides avantages que lui fit l’électeur, il y ajouta toute l’aisance de la vie, en le faisant son grand écuyer, avec la permission du roi. La noce s’en fit à Compiègne, sans aucun parent du comte d’Albert, d’où, incessamment après, tout ce bagage, et la cour, et les équipages de l’électeur, prirent le chemin de la Bavière. Ce prince vit le roi dans son cabinet par les derrières au sortir du sermon, l’après-dînée du vendredi 22 mars à Versailles. Le roi l’embrassa à diverses reprises ; et l’électeur prit congé, et s’en retourna à Paris, chez d’Antin, où il soupa avec Mme la Duchesse et beaucoup de dames. Il y joua et y coucha, et partit le lendemain matin pour retourner dans ses États.