Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 12.djvu/270

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s’imposeront ; les assurer que ce qu’on leur demande demeurera secret, pour ne pas intéresser leur crédit et leur réputation ; leur faire à chacun des propositions modérées et proportionnées à ce que l’on peut raisonnablement savoir de leurs profits ; leur répartir les brevets de retenue et les lieutenances générales des provinces par lots, suivant ce qu’on seroit convenu avec eux, et le temps court pour apporter les démissions et les quittances ; et si quelques-uns d’eux faisoient les insolents, les traiter militairement, de Turc à More, et subitement sans merci pour donner exemple aux autres.

À l’égard de ceux qui sont revêtus de ces emplois, dont il se trouveroit quelques-uns à conserver jusqu’à vacance, leur parler civilement, mais en leur montrant qu’on veut être obéi. Pour les lieutenances de roi, où il y en auroit peut-être fort peu à conserver : mais en leur déclarant qu’il n’y a plus d’hérédité, la plupart se trouveroient de telle espèce qu’il n’y auroit pas grande différence entre elles et les charges municipales créées de même, et qui ont été supprimées aux dernières paix, et point ou très peu remboursées. Quelle comparaison entre le mécontentement des remboursés et des supprimés de ces charges, et l’acclamation de toutes les troupes que M. le duc d’Orléans se dévoueroit par la réalité et par l’espérance de cette multiplication de belles récompenses, depuis le premier lieutenant général jusqu’au dernier enseigne et cornette, parce que ce grand nombre de différentes récompenses déboucheroit bien plus aisément les tètes des corps, et donneroit de justes espérances à la queue de monter plus tôt, et d’arriver ; et quelle sûreté et quelle facilité dans tout le cours de la régence ; et quelle considération après recueilleroit ce prince de s’être ainsi attaché toute la cour et tout le militaire de tout grade, et de les avoir mis de plus dans sa dépendance par ces solides espérances ! Je dis jusqu’au dernier cornette : en voici la raison.

En proposant à M. le duc d’Orléans tout ce qui vient d’être