Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/152

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aux Noailles. Le régent y joignit Effiat que je lui avois proposé pendant la vie du roi pour ce conseil, par la richesse dont il étoit, et le grand ordre qu’il tenoit dans ses affaires, et qui étoit fort propre à bien voir tout ce qu’il s’y passeroit, et à en tenir M. le duc d’Orléans bien averti. Le duc de Noailles choisit La Blinière, ancien avocat, pour secrétaire, qui s’étoit acquis de l’estime au barreau. Pelletier des Forts, Gaumont, Gilbert de Voisins et Baudry y furent joints.

Ces établissements, parmi lesquels on ne disoit mot à Pontchartrain, le mirent en grande inquiétude. Il s’étoit bassement mis sous la protection du maréchal de Besons dont il réclamoit la parenté, et d’Effiat par lui, à qui Besons s’étoit de longue main amalgamé. Ils ne se trouvèrent pas assez forts pour se promettre de le maintenir. Ils firent donc venir son père de Pontchartrain, à qui ils procurèrent une audience secrète de M. le duc d’Orléans au Palais-Royal par les derrières, qui conservoit de la considération pour lui. L’ex-chancelier lui parla si bien qu’il en obtint que son fils ne seroit point chassé, tellement que lorsque j’en voulus presser le régent, je trouvai un changement que je ne pouvois prévoir. Je fus quelque temps à découvrir cette visite ; il fallut attendre, mais je ne perdis pas mon dessein de vue, et bientôt après j’en vins à bout.

Peu après le maréchal d’Huxelles, avec qui le régent avoit déjà travaillé, fut déclaré chef du conseil des affaires étrangères. Le maréchal et l’abbé d’Estrées s’intriguoient depuis longtemps auprès de M. le duc d’Orléans, je n’oseroit ajouter auprès de moi, mais avec une crainte et des mystères tout à fait plaisants. L’abbé avoit donné plusieurs mémoires historiques sur le gouvernement de l’État à M. le duc d’Orléans et à moi. Il parvint donc à être de ce conseil des affaires étrangères, porté par ses ambassades, par la haine de Mme des Ursins, par les Noailles et par moi. J’y fis entrer Cheverny, dont j’ai parlé ailleurs, qui avoit été envoyé extraordinaire à Vienne, et ambassadeur en Danemark, et M. le duc d’Orléans