Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/244

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feu roi, n’avoit pas moins de peur de la réunion de tous les gens de qualité avec les ducs contre ces mêmes choses. Par cette nouvelle adresse, il se délivroit de cette frayeur, s’assuroit au contraire de cet attroupement, et comptoit de donner par là une occupation de défense à ceux dont il redoutoit les attaques.

Le parlement, d’autre part, qui ne vouloit point répondre au régent sur le bonnet, ni les autres choses qui regardoient les ducs, étoit ravi de les voir attaqués de la sorte, et se réjouissoit de la diversion. Peu contents de leur nombre, ces messieurs écrivirent dans les provinces, y procurèrent des assemblées et des adjonctions à eux par députés, et le duc du Maine et le premier président firent par le bailli de Mesmes, ambassadeur de Malte, que tous les chevaliers de Malte, comme noblesse, s’y unirent aussi

Rien de plus scandaleux ni de plus vain : scandaleux, parce que nul ordre ne doit et ne peut s’assembler que par ordre ou par permission du roi, beaucoup moins pratiquer des adjonctions, et parce que la noblesse ne peut être considérée comme telle, et comme faisant corps, que dans les états généraux, ou dans une assemblée convoquée par le roi et formée en conséquence dans les provinces, par bailliages, pour faire les députations, comme il se pratique pour les états généraux. Ainsi cette foule assemblée d’elle-même, cherchant à s’organiser de sa propre autorité, ne pouvoit être qu’un ramas informe, sans consistance, sans nom, sans fonction, sans mouvement légitime, bien loin de pouvoir prédire le nom de la noblesse et du second ordre de l’État. C’est à quoi pas un d’eux ne pouvoit répondre. Rien aussi de plus vain que leurs clameurs et leurs démarches, et ils ne savoient que dire lorsqu’on leur demandoit ce qu’ils vouloient, et sur quel fondement ; s’ils valoient mieux que leurs pères et leurs ancêtres, qui n’avoient jamais imaginé de se blesser de rien à l’égard des ducs ; s’ils connoissoient un pays policé dans le monde entier qui n’eût pas ses dignités,