Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/373

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lui. À son tour il admira son esprit, sa capacité, ses vues ; la brouillerie ouverte de Stairs avec tout le gouvernement du feu roi fut un autre attrait très puissant pour Canillac, qui haïssait les gens en crédit et en place, le feu roi et tous ceux qu’il y avoit mis. Stairs prit grand soin de le cultiver et de le séduire, et bientôt Canillac ne vit plus rien que par ses yeux. Son union avec le duc de Noailles lui fit souhaiter celle de Stairs avec lui. Noailles, qui l’avoit conquis par la même voie, qui avoit si bien réussi à Stairs, avoit pour maxime de ne le contredire jamais et de l’admirer toujours ; ainsi la connoissance fut bientôt faite, et de là les raisonnements politiques entre eux.

Pour l’abbé Dubois, la liaison fut bientôt faite ; il ne la souhaitoit pas moins que Stairs. Stanhope étoit secrétaire d’État et ministre confident du roi Georges. Il avoit autrefois passé quelque temps à Paris ; il y avoit vu Dubois chez Mme de Sandwich, qui fut beaucoup d’années de suite en France, et qui étoit en galanterie avec l’abbé. Lui et Stanhope firent grande amitié de voyageur et de débauche ; l’abbé le fit connoître à M. le duc d’Orléans, qui le vit familièrement depuis, et l’admit en quelques-unes de ses parties. Stanhope et Dubois se firent faire souvent des compliments par Mme de Sandwich, depuis le retour de Stanhope en Angleterre. Il se trouva à la tête des troupes anglaises en Espagne, lorsque M. le duc d’Orléans et l’abbé Dubois y étoient, où d’armée à armée ils eurent tout le commerce que put permettre l’état d’ennemis. On a vu en son lieu combien le prince et son abbé comptoient sur ce général anglois, dans ce que j’ai rapporté de l’affaire d’Espagne de M. le duc d’Orléans. Un autre Stanhope avoit succédé à celui-ci au commandement des troupes en Espagne, dont la catastrophe a été marquée en son temps, et le lord Stanhope, connu de l’abbé Dubois et de M. le duc d’Orléans, étoit devenu secrétaire d’État. Dubois, à qui l’ambition et le goût de l’intrigue ne laissoit point de repos, bâtissoit en esprit sur ses anciennes