Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 13.djvu/41

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rien, mais qui imposoit tort, à ne considérer que ce qui étoit autour d’elle.

Toujours très bien mise, noblement, proprement, de bon goût, mais très modestement et plus vieillement alors que son âge. Depuis qu’elle ne parut plus en public, on ne voyoit que coiffes et écharpe noire quand par hasard on l’apercevoit.

Elle n’alloit jamais chez le roi qu’il ne fût malade, ou que les matins des jours qu’il avoit pris médecine, et à peu près de même chez Mme la duchesse de Bourgogne, jamais ailleurs pour aucun devoir.

Chez elle, avec le roi, ils étoient chacun dans leur fauteuil, une table devant chacun d’eux, aux deux coins de la cheminée, elle du côté du lit, le roi le dos à la muraille du côté de la porte de l’antichambre, et deux tabourets devant sa table, un pour le ministre qui venoit travailler, l’autre pour son sac. Les jours de travail, ils n’étoient seuls ensemble que fort peu de temps avant que le ministre entrât, et moins encore fort souvent après qu’il étoit sorti. Le roi passoit à une chaise percée, revenoit au lit de Mme de Maintenon, où il se tenoit debout fort peu, lui donnoit le bonsoir, et s’en alloit se mettre à table. Telle étoit la mécanique de chez Mme de Maintenon. On a vu sur Mme la duchesse de Bourgogne ce qui l’y regardoit, tant qu’elle a vécu.

Pendant le travail, Mme de Maintenon lisoit ou travailloit en tapisserie. Elle entendoit tout ce qui se passoit entre le roi et le ministre, qui parloient tout haut. Rarement elle y mêloit son mot, plus rarement ce mot étoit de quelque conséquence. Souvent le roi lui demandoit son avis. Alors elle répondoit avec de grandes mesures. Jamais, ou comme jamais, elle ne paraissoit affectionner rien, et moins encore s’intéresser pour personne ; mais elle étoit d’accord avec le ministre qui n’osoit en particulier ne pas convenir de ce qu’elle vouloit, ni encore moins broncher en sa présence. Dès qu’il s’agissoit donc de quelque grâce ou de quelque emploi,