Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/142

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reine d’Espagne altière, et le fait sentir au duc et à la duchesse de Parme. — Peines de Beretti. — Heinsius veut traiter avec l’empereur avant de traiter avec l’Espagne. — Conditions proposées par la Hollande à l’empereur, qui s’opiniâtre au silence. — Manèges des Impériaux et de Bentivoglio pour empêcher le traité entre la France, l’Angleterre et la Hollande.


Cependant [1] le traité entre la France et l’Angleterre fut signé à la Haye à la fin de novembre, mais secrètement, à condition qu’il n’en seroit rien dit de part ni d’autre pendant un mois, terme jugé suffisant pour laisser le temps aux Hollandois de prendre une dernière résolution sur la conclusion de cette alliance. Elle déplut particulièrement aux Suédois, qui par là se crurent abandonnés de la France. Le comte de Gyllembourg étoit ambassadeur de cette couronne en Angleterre. Le baron de Spaar avoit le même caractère en France ; et le baron de Goertz, ministre d’État et chef des finances de Suède, étoit de sa part à la Haye. Dès qu’ils virent avancer le traité entre la France et l’Angleterre, ils crurent que la principale ressource du roi de Suède étoit d’exciter des troubles en Angleterre. Il y avoit longtemps que Gyllembourg le proposoit, et qu’il assuroit que les difficultés n’en étoient pas si grandes qu’on se le figuroit.

Spaar et Goertz se virent sur la frontière ; le dernier vint faire un tour à Paris. Ils convinrent tous deux qu’il falloit profiter de la disposition générale de l’Écosse en faveur du Prétendant, et d’une grande partie de celles de l’Angleterre. Goertz retourné à la Haye fut de nouveau pressé par Gyllembourg, qui lui manda que les jacobites demandoient dix mille hommes, et qu’il croyoit que l’argent ne manqueroit pas. Goertz ignoroit les intérêts du roi de Suède là-dessus. On prétend que Spaar et lui étoient convenus de différer à lui rendre compte de ce projet jusqu’à ce qu’eux-mêmes y aperçussent plus de solidité. Ils ne pouvoient hasarder de l’en instruire par lettres, qui n’arrivoient jusqu’au roi de Suède qu’avec beaucoup de difficulté et de danger d’être interceptées. Il falloit

  1. Voyez la note II en fin de volume.