Page:Saint-Simon - Mémoires, Chéruel, Hachette, 1857, octavo, tome 14.djvu/241

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Lettre de Stanhope à Beretti, et de celui-ci à Albéroni. — Son embarras. — Ordres qu’il en reçoit et raisonnement. — Vues et mesures de commerce intérieur et de politique au dehors d’Albéroni. — Angoisses du roi de Sicile éconduit par l’Espagne. — Venise veut se raccommoder avec le roi d’Espagne.


Le roi d’Angleterre, en arrivant à Londres, avoit donné ses premiers soins à réunir ses principaux ministres qui ne songeoient qu’à s’entre-détruire. Towsend avoit promis d’accepter la vice-royauté d’Irlande, et d’y demeurer trois ans si le roi ne le rappeloit auparavant ; Mothwen avoit été fait second secrétaire d’État. Le département du sud lui avoit été donné, quoique ce fût celui du premier, pour laisser le nord à Stanhope et le soin des affaires d’Allemagne, qui touchoient le roi d’Angleterre bien plus quo toutes les autres par rapport à ses États patrimoniaux. Le parlement avoit été prorogé jusqu’au 20 février (vieux style), pour avoir le temps de disposer la nation à la conservation des troupes, dont on ne seroit pas venu à bout si les ministres qui venoient de découvrir le projet des ministres de Suède n’eussent fait alors éclater la conspiration. Gyllembourg, envoyé de Suède, fut arrêté dans sa maison à Londres, le 9 février à dix heures du soir. Vingt-cinq grenadiers posés à sa porte eurent ordre d’empêcher que personne pût lui parler : on rompit ses cabinets et ses coffres ; ses papiers furent enlevés sans inventaire et sans scellé ; on répandit dans le public que le complot avoit été découvert par trois lettres que Goertz écrivoit à Gyllembourg, avec ses réponses, et le chiffre dont ils se servoient ; qu’on y avoit vu le projet d’une descente à faire en Écosse ; quo Goertz avoit déjà touché cent mille florins en Hollande, depuis dix mille livres sterling à Paris ; que Gyllembourg avoit reçu vingt mille livres sterling à Londres.

Presque tous les ministres étrangers qui étoient à Londres sentiront les conséquences de cet arrêt pour leur propre sûreté, et s’assemblèrent chez Monteléon, ambassadeur